Le cinéma Ariana, symbole emblématique de la culture cinématographique à Kaboul, a été démoli pour laisser place à un centre commercial, comme l'a rapporté l'AFP. Restauré en 2004 grâce au soutien de professionnels français, cet établissement, qui avait ouvert ses portes au cœur des années 60, a vu disparaître des souvenirs précieux pour des générations d'Afghans.
Depuis le retour des talibans au pouvoir en 2021, les mesures ultra-rigoristes ont frappé durement la culture dans le pays. Bien que le cinéma était fermé depuis plusieurs années, son édifice avait échappé à la destruction jusqu'à récemment. La démolition, visible depuis la rue, a profondément affecté de nombreux citoyens. "C'était un lieu de vie et de partage. Sa destruction m'attriste énormément," confie une habitante de 65 ans, nostalgique des projections de films dans son enfance.
L'Ariana avait su rassembler des amoureux du septième art, offrant une vitrine au cinéma mondial dans un pays marqué par les conflits. Après avoir frôlé la destruction totale lors de la guerre civile entre 1992 et 1996, il avait été reconstruit grâce à des efforts collectifs d'architectes et d'organisations françaises telles que "Un cinéma pour Kaboul", sous la présidence de Claude Lelouch, reconnu pour son prix à Cannes avec "Un homme et une femme" en 1966.
La réouverture, célébrée en mai 2004, avait suscité une grande émotion. Le ministre français de la Culture de l'époque, Renaud Donnedieu de Vabres, et Jacques Chirac, président de la République, avaient souligné l'importance de ce lieu, symbole de lumière et de culture. "Un cinéma est toujours une lumière dans la ville," avait déclaré Chirac, soulignant le rôle essentiel des espaces de loisirs dans la société.
Pour l'écrivain et cinéaste franco-afghan Atiq Rahimi, la démolition de l'Ariana représente bien plus qu'une perte matérielle. "C'était un lieu de mémoire. On ne détruit pas un symbole de culture au nom du "moderne". Ce sont nos racines qui sont effacées, alors que la culture devrait toujours survivre," déplore-t-il. Rahimi avait lui-même présenté son premier film au cinéma Ariana, dans l'espoir que la culture pourrait perdurer malgré les défis.
Alors que le centre commercial prend forme, la nostalgie demeure vive dans le cœur de ceux qui ont connu l'Ariana. Sa démolition est un rappel douloureux de la fragilité de la culture face à des changements politiques et sociaux, laissant un vide dans le paysage culturel de Kaboul.







