Ahmed Néjib Chebbi, président du Front du salut national et personnalité emblématique de l'opposition tunisienne, a été arrêté jeudi 4 décembre à son domicile. Cette arrestation intervient après sa récente condamnation en appel à douze ans de prison pour complot contre la sûreté de l'État. Des sources proches de sa famille, ainsi que son avocat, ont confirmé cette arrestation, expriment des préoccupations croissantes sur l'état de la démocratie en Tunisie.
Âgé de 81 ans, M. Chebbi a été condamné après que sa peine initiale de dix-huit ans ait été réduite en appel. Sa fille, Haïfa Chebbi, a déclaré après son arrestation que son père était emmené par les forces de l'ordre et a pointé du doigt un climat politique de plus en plus hostile. "La scène politique est devenue effrayante" a commenté l'avocat Amine Bouker, en résonance avec les craintes de nombreux experts qui dénoncent un recul des libertés depuis le coup d'État du président Kaïs Saïed en juillet 2021.
Cette arrestation n’est pas isolée, car elle suit celle d’autres figures de l’opposition, notamment l’avocat Ayachi Hammami et la militante Chaïma Issa, également condamnés à des peines de prison sévères. Ce climat répressif a conduit de nombreuses ONG, tant tunisiennes qu’internationales, à dénoncer une dégradation des droits humains et une oppression croissante des voix dissidentes. L'Observatoire tunisien des droits de l'homme a d'ailleurs émis un communiqué soulignant que "la détention d'opposants politiques reflète une volonté manifeste d'étouffer toute critique du pouvoir".
La création du Front du salut national, en réponse à la concentration des pouvoirs par Saïed, s'annonce comme une tentative de regrouper les forces d'opposition. Chebbi, qui a été un acteur clé de la politique tunisienne depuis des décennies, a défié les régimes successifs, allant de celui de Ben Ali à celui en place actuellement. Son arrestation soulève des questions cruciales sur l'avenir des droits civiques et politiques en Tunisie, un pays qui, après le printemps arabe de 2011, avait promis d’inscrire la démocratie au cœur de sa gouvernance.
Des représentants politiques, dont ceux du parti islamiste Ennahdha et du Parti destourien libre, ont appelé à une solidarité accrue parmi les acteurs de l'opposition. Samir Dilou, avocat, a dénoncé ce qu'il appelle un "rouleau compresseur qui vise tout le monde", illustrant ainsi un consensus croissant sur la nécessité d'unir les forces en réponse à la répression actuelle. Wissem Sghaier, porte-parole du parti Al-Joumhouri, a souligné que la situation actuelle est sans précédent dans l'histoire moderne de la Tunisie, ce qui incite les citoyens et les acteurs politiques à redoubler d'efforts pour défendre les valeurs démocratiques.







