La Haye (AFP) – Mame Mandiaye Niang, procureur adjoint de la Cour pénale internationale (CPI), a exprimé son indignation face aux sanctions imposées par l'administration américaine, qu'il considère comme une assimilation inacceptable des magistrats de la cour à des criminels de guerre et des trafiquants de drogue.
Lors d'un entretien accordé à l’AFP, Niang a évoqué la possibilité d'organiser des audiences par contumace pour des leaders mondiaux, tels que le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu, actuellement sous enquête pour crimes de guerre liés au conflit à Gaza. "Il est essentiel de garantir que toutes les voix, y compris celles des victimes, soient entendues, même si les accusés ne se présentent pas", a-t-il déclaré.
Les sanctions américaines, notamment celles instaurées durant le mandat de Donald Trump, affectent considérablement la vie quotidienne de Niang. Ce dernier a révélé que ses comptes bancaires étaient bloqués, l'empêchant ainsi de financer même des besoins essentiels, comme la recharge de son véhicule hybride. "Le fait de se retrouver sur la même liste que des terroristes est un affront à la justice", a affirmé Niang avec véhémence.
Les sanctions, tout en ayant leur place dans les relations internationales, pourraient nuire à la légitimité de la CPI, qui joue un rôle crucial dans le jugement des crimes de guerre. L'organe judiciaire fait face à des défis complexes, notamment l'incapacité à faire comparaître des suspects comme Vladimir Poutine et Netanyahu, en raison de l'absence de force de police propre.
"Nous avons récemment fait une avancée avec une audience par contumace dans le dossier de Joseph Kony, une première pour nous", a indiqué Niang, soulignant que cela pourrait ouvrir la voie à des mesures similaires contre d'autres dirigeants sous enquête. Cela désigne un changement potentiel dans la stratégie de la CPI, afin de conserver son influence et son efficacité dans des contextes difficiles.
Actuellement, la CPI sous la direction par intérim de Niang traverse une période trouble en raison d'allégations d'abus sexuels pesant sur le procureur général Karim Khan. "Ces accusations, bien qu'infondées, ont terni l'atmosphère de notre institution", a précisé Niang.
Malgré les obstacles, il reste optimiste quant à l’avenir de la CPI. Cette année, l’institution a réussi à obtenir l’arrestation de l’ancien président philippin Rodrigo Duterte et a engagé des enquêtes sur des crimes en cours à l’échelle mondiale, y compris en Ukraine.
Pour Niang, le travail de la CPI est plus pertinent que jamais. "Le monde doit continuer à croire en la justice internationale. Chaque jour de crimes de masse nous pousse à redoubler d’efforts pour les juger. La CPI est nécessaire, et notre engagement est plus fort que jamais, bien que le chemin soit parsemé d'embûches", a-t-il conclu.







